MORPHO
FESTIVAL DE LA COOPÉRATIVE CHORÉGRAPHIQUE
DANSE – PERFORMANCES – CONCERTS
SÉPULCRE – CAEN
ÉDITO
2020
La crise sanitaire que nous traversons vient aussi révéler d’autres crises sous-jacentes ; économiques, politiques, sociales, artistiques, qui nous obligent à penser simultanément deux temporalités : le temps court de la réponse, et un temps long qui est celui de l’anticipation, et d’une certaine forme de ré-organisation, qui doit pouvoir se penser partout ailleurs.
On l’a vu au niveau de l’état, le manque d’anticipation force des réponses parfois non adéquates, ou démesurées, voire aveugles. La question de l’autonomie des ressources logistiques, de dépendances à un système devenu fou, du « libéralisme heureux » comme disait jadis Alain Minc, est posée.
A notre niveau, local, et dans nos secteurs, culturels, les équations ne sont pas si différentes, et nous découvrons, peut-être un peu tardivement, que les réponses sont nécessairement politiques, et collectives. Par exemple, les hypothèses de relocalisation reviennent sur la table, les principes de solidarité redeviennent évidents.
Cependant, s’il faut donc penser un temps court, celui de la réponse immédiate à cette situation inédite, nous sommes convaincus qu’une pensée sur le long terme, dans le sens d’une modification, ou d’une avancée, d’une refondation des fonctionnements, parfois trop considérés comme évidents parce qu’ils sont la « règle de l’habitude » depuis des années, ne peut pas être évitée.
Plus précisément, s’il faut aujourd’hui répondre à cette situation d’urgence, nous devons d’abord reconsidérer la richesse extraordinaire de notre région en termes de structures culturelles, de lieux petits et grands, et s’appuyer sur le vivier prolifique de tous ses acteurs, compagnies, artistes indépendants, initiatives locales, associatives, qui forment depuis des décennies le tissu profond de notre culture locale et régionale.
Comment ? En leur faisant davantage confiance, et en se méfiant des prophéties autotéliques, qui produisent ce qui est redouté, du genre « il n’y a pas de danse dans la région », par exemple.
En réalité, nous pouvons, nous devons compter sur toutes les forces vives, qui savent travailler ensemble depuis longtemps, mais qui peinent trop souvent à trouver des moyens et des lieux qui leur donneraient une véritable visibilité, qui leur permettraient de jouer pleinement leur rôle de vecteurs d’unité et de garants du tissu social et culturel, alors qu’ils sont à même de produire une véritable émulsion politique en faisant circuler les idées et les pratiques, souvent au plus prés, ou littéralement « avec » les publics.
Pour cela, il faut songer à la différence entre la rentabilité et l’équilibre économique des lieux culturels publics qui appartiennent à tous, et reprendre goût au risque, aux frottements, aux dissensus fertiles, qui n’ont pas toujours besoins de formes monumentales pour exister.
Ceci implique, par exemple, de sortir des tentations hégémoniques, d’où qu’elles viennent, et de retrouver le goût du partage, de l’aventure et de la concertation, si nécessaire à ce que chacun peut se représenter derrière ces principe d’intelligence collective, d’auto-éco-organisation et de pensée du long terme, qui constituent aujourd’hui, d’après nous, la véritable urgence.
En cela, cette période qui est devant nous, à partir d’aujourd’hui, sera précieuse si nous voulons nous mettre au travail dans ce sens.
Concrètement, concernant le projet de La Coopérative Chorégraphique au Sépulcre, nous sommes très heureux d’avoir réussi à tisser des liens solides et constructifs avec les services de la ville de Caen, appuyés par une volonté politique précieuse.
Ceci change la donne, et casse l’image de la partition figée de ceux qui demandent, et ceux qui accordent ou non.
Nous avons construit un projet, pour et avec la collectivité, dont un des objectifs est de répondre à la pénurie de lieux de recherche et de création pour les compagnies chorégraphiques, tout en travaillant à rendre ce lieu superbe qu’est le Sépulcre, au public, tout au long de l’année.
Depuis notre courte existence nous avons accueilli, avec peu de moyens financiers, mais beaucoup de volonté, 7 compagnies, en plus des 4 qui forment le cœur de la coopérative chorégraphique. Un travail avec l’ESSOR, la CIMADE et les personnes exilées y a sa place.
Nous organiserons aussi des ateliers, des festivals, des conférences, ouverts à tous, et gratuit chaque fois que cela sera possible. Nous sommes aussi en train de construire des partenariats solides avec l’ensemble des structures culturelles de l’agglomération en stimulant l’implication des habitants du quartier dans ce qui relie notre action à un principe fondamental et d’une grande vitalité, celui des Communs.
Pour La Coopérative Chorégraphique,
Alexandre Le Petit – Cie NOESIS
La Coopérative Chorégraphique
9, place du Sépulcre – CAEN
Avec le soutien de la Ville de Caen
et du Centre Chorégraphique National de Caen en Normandie